Béatrice Michalland Sous-directrice de l’Information Environnementale au sein du Service des Données et Etudes Statistiques du Commissariat Général au Développement Durable, Ministère de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques (MTEECPR), Co-présidente du GIS Sol (témoignage issu du dossier « Info&Sols, un dispositif partenarial pour la connaissance et la surveillance des sols en France » – 2024)
Le Ministère en charge de l’environnement assure la co-présidence du GIS Sol. Quels sont ses besoins en connaissance et surveillance des sols ?
« Le MTEECPR est impliqué dans le GIS Sol depuis sa création (2001) ; au départ via l’IFEN (institut français de l’environnement) qui intégrera le ministère en 2008. En charge de rassembler et mettre à disposition les informations sur l’état de l’environnement en France, ce service s’est intéressé très tôt à l’état des sols. Aujourd’hui le MTEECPR ne se focalise pas uniquement sur la connaissance de l’état des sols mais également sur les pressions qui s’y exercent (artificialisation, pollution) et les services écosystémiques qu’ils fournissent (stockage du carbone, filtration/rétention de l’eau, réservoir de biodiversité, …). Les sols sont reconnus dans le code de l’environnement comme un élément du patrimoine commun et leurs services comme d’intérêt commun (Article L110-1) depuis 2016 via la loi pour la reconquête de la biodiversité et des paysages.
Au total, cinq Directions du MTEECPR ont en charge de politiques en lien avec les sols : la DGPR (sols et sites pollués, risques naturels avec érosion ou mouvement de terrain…), la DEB (solutions fondées sur la nature, biodiversité, gestion de l’eau), la DHUP (aménagement/artificialisation), la DGEC (climat) et enfin le CGDD sur les aspects informations environnementale et données. »
Comment les travaux du GIS Sol répondent-ils aux besoins du MTEECPR ?
« Le programme d’inventaire, de gestion et de conservation des sols (IGCS) permet de disposer maintenant d’une carte des sols dominants pour toute la France au 250 000ème. Le programme de mesure systématique de qualité des sols (RMQS) contribue à dresser un état des sols français, et permet de suivre son évolution. Les 2240 points qui le composent fournissent un outil de connaissance générale, qui doit être complété par une compréhension de la relation entre usages, pratiques et état au fil du temps. C’est l’enjeu de la 2ème campagne de suivi qui a débuté en 2016 et qui devrait s’achever en 2030. Lorsque des données plus précises sont nécessaires pour orienter un PLUi par exemple, les données du GIS Sol sont insuffisantes. Mais le GIS Sol peut apporter son savoir-faire à des acteurs locaux d’autant plus qu’il entretient de multiples partenariats locaux. Grâce au GIS Sol, nous disposons d’un vrai réseau de pédologues et de géologues et de liens solides avec les Chambres d’Agriculture.
Je partage la présidence du GIS Sol avec le MASAF. Cela nous amène à travailler ensemble de façon proche et à partager nos priorités. Cela a facilité la préparation des positions de la France sur le projet de la directive européenne sur les sols en cours de négociation. »
Quel sont les besoins en science pour protéger les sols aujourd’hui ?
« Pour ne donner qu’un exemple, l’atténuation du changement climatique passe par plus de stockage de carbone dans les sols (projet 4 pour 1000) et dans les forêts. Reste à savoir comment favoriser ce stockage et où le faire ? Où sont les risques d’érosion de sol qui pourrait mettre à mal ce stockage ? Comment aider la forêt, via une bonne gestion des sols forestiers, à mieux résister aux effets du changement climatique ? Les questions sont nombreuses.
La directive européenne relative à la surveillance et à la résilience des sols de son côté donnera des objectifs en matière de qualité des sols. Dans un premier temps, il s’agira surtout de surveillance, de diffusion de bonnes pratiques de gestion durable des sols ; mais à terme, pour rétablir la bonne santé des sols, des actions seront à proposer. Ce défi à relever fera l’objet d’un travail collaboratif important entre le GIS Sol et les ministères concernés. A court terme, le GIS Sol est mobilisé pour d’une part savoir comment disposer d’un bon échantillonnage de points de surveillance permettant de répondre aux ambitions de la directive et d’autre part pour retenir des seuils pour caractériser la bonne santé des sols dans le contexte français.
La proximité avec la science et la recherche nous garantit la pertinence de surveillance à mettre en place et la compréhension des phénomènes explicatifs. Les synthèses attendues de cette production scientifique foisonnante mettent en lumière la richesse méconnue des sols, indispensable pour mieux les protéger. C’est notamment dans ce contexte que sous l’impulsion du GIS Sol, INRAE a piloté une étude visant à définir un référentiel d’indicateurs sur les sols pour qualifier la qualité des sols et dont les résultats ont été rendus publics le 20 novembre dernier. »
Témoignage issu de notre dossier thématique
Dossier thématique
Info&Sols, un dispositif partenarial pour la connaissance et la surveillance des sols en France
En interface avec l’eau, l’air, la roche, le vivant, les sols sont des milieux vivants et fragiles à préserver. Ils sont au cœur d’enjeux mondiaux cruciaux pour la planète et pour notre propre survie. Or, à l’échelle européenne, plus de 60 % des sols sont dégradés. Ce dossier retrace la mise en place d’un système de connaissance et de surveillance des sols en France, les politiques publiques qui ont bénéficié de ces avancées scientifiques ainsi que les problématiques émergentes au sujet des sols.