Lionel Berthet – Sous-directeur de la connaissance des aléas et de la prévention, Service des risques naturels et hydrauliques, Direction générale de la prévention des risques, Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (témoignage issu du dossier « 30 ans de recherche pour la prévention des inondations » – 2022)

Trois questions à Lionel Berthet :

Quelles sont les relations entre la prévention des risques à la DGPR et les scientifiques ?

« Au sein de la DGPR, la sous-direction de la connaissance des aléas et de la prévention est chargée des risques inondation et littoraux, des risques naturels terrestres (comme les mouvements de terrain, les avalanches et les séismes) et de la sécurité des ouvrages hydrauliques. Elle mobilise une trentaine de personnes. Depuis mes débuts professionnels, j’ai pu constater que la collaboration avec les scientifiques d’INRAE était déjà bien installée. Pour nous, en administration centrale ou services déconcentrés, INRAE, c’est un vivier de scientifiques qui mènent une recherche exigeante et opérationnelle : nous savons pouvoir compter sur eux pour appréhender et réagir face à des phénomènes complexes et assez rares comme dans le cas récent de la tempête Alex, caractériser l’aléa, ou encore construire une grille d’analyse socio-économique pour la reconstruction. La convention qui organise la coopération INRAE / DGPR fait une place importante au soutien d’activité de recherches, notamment pour mieux comprendre les différents aléas naturels. Une connaissance indispensable pour élaborer les différents outils de la prévention et de la protection des populations. »

Peut-on dire que les risques d’inondation se sont aggravés ?

« Face à un évènement rare et intense, nous avons tendance à le ressentir comme « le plus » catastrophique jamais subi. En réalité, il faut aborder la question des risques dans une perspective historique : les dernières inondations dommageables sur la Loire et la Seine en 2016 et 2018 sont sans commune mesure avec le débordement dévastateur de la Seine à Paris en 1910. Ce serait de même un raccourci de dire que de plus en plus de citoyens sont exposés aux inondations. Une étude de la Caisse centrale de réassurance montre qu’en réalité, les outils de la prévention ont permis de contenir les coûts et dommages. Nous disposons d’ailleurs de modèles de plus en plus fiables, notamment grâce aux travaux d’INRAE, pour prévoir et simuler, étape essentielle pour anticiper l’action, et prévenir et limiter les dommages, en priorité humains. »

Quelles sont les questions scientifiques d’aujourd’hui et de demain ?

« Il reste encore de nombreuses questions qui nécessitent des avancées scientifiques. D’abord, la caractérisation de l’aléa reste perfectible pour plusieurs phénomènes naturels. C’est d’autant plus le cas quand ils nécessitent une description à une petite échelle spatio-temporelle. Par exemple, si la caractérisation des inondations des grands cours d’eau est globalement satisfaisante, des progrès sont nécessaires pour décrire et anticiper les risques associés aux crues rapides et plus encore au ruissellement. Pour l’avenir, la connaissance des effets du changement climatique sur les aléas est très diverse : s’il y a un assez bon consensus scientifique quant à l’élévation du niveau moyen de la mer, il reste difficile d’estimer les effets sur les pluies intenses, en particulier dans le Sud de la France, et encore plus sur les inondations qui en résulteront du fait de la multiplicité des facteurs à prendre en compte, notamment l’humidité du sol. Au-delà des inondations, les risques liés aux feux de forêt et aux sécheresses doivent être éclairés scientifiquement et INRAE nous accompagne sur ces volets. L’appui des scientifiques est plus que jamais primordial. Le dialogue avec cette communauté, qui a débuté il y a plus de 20 ans et qui fonctionne très bien, doit donc se poursuivre. »

Témoignage issu de notre dossier thématique

30 ans de recherche pour la prévention des inondations

Le risque d’inondation est le premier risque naturel en France en termes d’impacts et d’étendue. Expertes des risques liés à l’eau, six équipes scientifiques d’INRAE contribuent à la mise en œuvre de la politique de prévention des inondations. Elles travaillent sur des outils et méthodes de prévision et de prévention de ce risque présentés dans ce dossier.

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